Good vibrations ? Harmut Rosa ?

Personne, absolument personne, sauf des martiens égarés sur Neptune ne connait Harmut Rosa et son idée de “résonance”.

Harmut Rosa. On dirait, curieusement, un nom de femme. Mais c’est un homme, sociologue et philosophe allemand. C’est le théoricien de “l’accélération”. Nous souffrons, dit-il,d’une pénurie de temps, et ce, alors même que le temps libre augmente. Et toujours un acte à accomplir (« il faut que je relise les journaux », « que je me mette au violon », « que je prenne des vacances ») et nous ne supportons plus la lenteur, quelque soit le domaine concerné. Tout doit être immédiat, de l’ouverture d’une page Web, à la réponse à la question difficile. Et que nous avons le sentiment que nous n’avons plus le temps de rien entreprendre.

Il en résulte une activité paradoxale : on remet l’essentiel à plus tard et l’on entreprend immédiatement ce qui est facile, immédiat, accessible sans effort (l’industrie du divertissement y gagne).

Par ailleurs, ajoute t-il, nous ne voulons être liés à rien, toujours presque dépressifs et démobilisés.

Bref, le théoricien nous donne une image de la “modernité assez noire, considérant que la lenteur, difficile à atteindre, devrait être notre objectif.

L’on est un peu confus de résumer, maladroitement, cette pensée de l’accélération comme critère de la modernité et l’on invite le lecteur à aller voir.

Ici, par exemple, par un clic:

Ou encore là 

Ici, encore : 

Et partout sur le Web, par une recherche facile.

L’homme, malgré quelquefois la tautologie dans l’exposé, est intéressant. Un vrai théoricien, rare dans les temps présents.

On ne dit pas vraiment si on l’apprécie. Histoire de ne pas s’immiscer dans la découverte, assez essentielle.

Mais  ce qui nous retient aujourd’hui, c’est un autre concept, celui de résonance. Quand est découvert un “lien vibrant” entre le monde et nous.

Le concept de résonance que beaucoup trouvent  assez fécond.

Dans un texte paru en 2013 (ICI un clic), il nous raconte le concept, sur un mode personnel, assez inédit pour un sociologue.

Il faut lire.

Je livre ci-dessous quelques citations du texte complet : Il décrit des vies de femmes.

“On peut tirer du cas d’Anna un premier enseignement : la vie nous réussit lorsque nous l’aimons, que nous avons une relation quasi charnelle à elle – aux humains, aux espaces, aux tâches à accomplir, aux choses et aux outils en présence desquels nous sommes et avec lesquels nous avons affaire. Quand nous les aimons, tout se passe comme s’il existait un « lien vibrant » entre nous et le monde. D’une part, ce lien se forme à travers ce que les psychosociologues appellent les « intérêts intrinsèques » : Anna aime sa famille, son travail, le volley-ball.”

Encore :

“On peut décrire la vie d’Anna comme imprégnée d’un rapport au monde réceptif, élastique et fluide – il faudrait même dire « souple » en ce qu’il épouse le monde et se laisse épouser par lui –, alors que le rapport de Hannah au monde apparaît muet, raide et froid. Anna voit le monde tel un lieu de défis passionnants et de possibilités attirantes ; Hannah perçoit les aléas de la vie comme une série de dangers impondérables et de perturbations fâcheuses. Anna se sent portée et transportée dans le monde et dans la vie ; Hannah se sent jetée dans le monde et exposée à lui.À celui qui est malheureux ou dépressif”

Et, pour finir (mais le texte complet a été proposé plus haut.

“Du coup, notre relation au monde perd de plus en plus son caractère sensible, et surtout corporel – or les axes de résonances qui sont si essentiels à notre sentiment de bien vivre comportent toujours et nécessairement une forte composante corporelle.Fort heureusement, la modernité dispose aussi de puissants antidotes. Elle ne peut simplement se réduire aux ravages qu’elle aurait fait subir à la résonance, bien au contraire ; elle a découvert et inventé des sphères de résonance tout à fait nouvelles et incroyablement puissantes. Pour bien des humains, le sport, par exemple, est un fabuleux terrain de résonance entre le monde et le corps (que nous avons et que nous sommes). On ne compte plus les histoires de jeunes gens qui, par et dans le football, ont fait l’expérience de résonances quasi mystiques avec le monde. En revanche, et je me bornerai ici à l’affirmer sans plus de préventions,la maîtrise du corps et de ses capacités telle qu’on la pratique dans les salles de fitness procéderait plutôt de la réification, en ce qu’il s’inscrit dans une relation muette au monde et dans une logique de croissance : c’est là qu’ira Hannah quand Anna préférera aller danser.

« Au sommet d’une montagne ou au bord de la mer, émus par les éléments, les hommes se sentent en relation avec une sphère de résonance vivante »

Le sport n’est toutefois pas la seule sphère de résonance que la modernité a engendrée ; il en est d’autres tout aussi puissantes, à commencer par l’art. « Résonance » n’est pas par hasard un terme emprunté à la musique. Au théâtre, au cinéma, au concert, nous sommes touchés et saisis, la vie et les flux nous traversent : les rires et les larmes en sont de bons témoignages. La nature est également devenue, pour nous Modernes, une sphère de résonance centrale et incontournable.”

Pour ceux qui n’aiment pas remonter dans le texte et retrouver un lien déjà offert, pour les fainéants, on le recolle ici.

Et maintenant, on conclut : Aime t-on Harmut Rosa ?

On laisse le lecteur deviner.

On a le projet de le commenter, très brièvement.

Il ne faut pas laisser les concepts vagabonder sans leur donner leur place ou les gommer de notre quotidien.