Camus, Colette, à la fin.

Il est toujours, évidemment, un moment ou l’homme s’interroge sur sa fin, sur la mort. Et il est assez impudique que de le dire, de l’écrire. Les sentiments unanimement partagés ne doivent pas se clamer, sauf à s’extraire du tout et se prétendre unique, solaire. Le verbe, dans ce champ, ne peut être, nécessairement, qu’un lieu commun, envahi par tous.

Il est cependant opportun, ne serait-ce que pour naviguer sur l’écume des mots qui roulent sur eux-mêmes comme des vagues infinies, de comparer les postures, les poses à vrai dire. Du moins celles mentales de ceux qui les donnent à lire.

Ainsi, Albert Camus, a pu considérer par sa “Peste” que grâce à l’épidémie, « l’affaire de nous tous ». les hommes se reconnaissent comme frères. Et que malgré son impuissance devant la mort, l’homme refuse le refuge illusoire d’une quelconque transcendance. En luttant contre la mort, il susciterait l’amour des autres qui authenthifierait son existence.

Cet humanisme assez béat m’a toujours stupéfait. Je n’arrive pas, encore maintenant, à comprendre comment l’on peut sombrer dans cette soupe, cette médaille en plaqué-or de la fausse simplicité portée sur un torse avachi. Il ne m’a pas m’a fallu des années d’illusion pour le comprendre. Je dois tellement me tromper. Mais les mots, encore une fois, dans ce champ de la décomposition n’ont pas leur place. Oui, oui, il est opportun et, peut-être même obligatoire, d’être aimé dans sa fin. Ce bien ne peut faire du mal. Même sans épidémie au demeurant. C’est le lieu commun camusien. Soit. Je le laisse aux poètes de tréteaux. Ceux du théâtre.

On peut, dans la même rigole de chemin, préférer Colette, l’écrivain ultime, laquelle, dans des pages discrètes et admirables, trouvera des accents pleins de pudeur et de simplicité pour évoquer le « dérivement » de la vieillesse et de la mort, parfaitement acceptées. Comme un paisible acquiescement à la loi de la nature. En réalité celle de notre temps, tant il est vrai qu’à la croire immuable cette « nature » deifiée , Gaia de pacotille, on tombe dans ce qui empoigne douloureusement Albert Camus, Cantor du misérabilisme humain porté aux nues.

Puis ce n’est pas un péché ni une tare que de penser à d’autres temps, d’autres espaces, dans la transcendance, qui peut ne pas être mièvre, loin de celle rejetée par l’amour des êtres pour d’autres êtres surgissant dans l’épidémie. En réalité un amour christique sans le Christ, inventé par notre Camus qui renverse l’objet (la fin), pour mieux retrouver son petit centre (le sujet conscient, donc aimant, amant de l’Autre.

Loin des espaces cassés dont les miettes tombent en pluie sur nos fronts, sans que n’y dégouline l’amour camusien.

Que j’aime Colette et sa simplicité complexe…

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