la porte

Pour les juifs, c’est bientôt Pessah, la Pâque juive. 

Beaucoup savent, même si l’inculture ou l’antisémitisme (deux faits qui peuvent objectivement coïncider) ont gagné du terrain, qu’il s’agit de commémorer la sortie des juifs d’Égypte. Charlton Heston qui incarnait Moïse dans le film de Cecil.B.De Mille a pu contribuer à « donner les images ».

Donc, pendant 8 jours, on célèbre. 

On mange la « matsot », la « galette » pour les juifs francophones, pain plat, sec, non levé, la sortie rapide du pays d’esclavage ayant empêché la pâte de se gonfler sous le tissu adéquat.

Et ce sont les deux premiers repas du soir, ceux du « Seder »,

La famille est réunie autour de la table enveloppée de la nappe blanche du beau jour, parsemée des victuailles qui vont scander les prières, pour clamer la fin de la soumission et l’exode, en masse, sous la férule de Moise et son frère Aaron, vers le pays de miel, Israël.

4o ans dans le désert, vers la terre promise, métaphore géographique, pour les intellectuels d’avant aujourd’hui, avant même nos Lumières, de la liberté en ébullition.

Dans ma jeunesse, ces soirées étaient attendues, pour mille motifs et non pas celui, exclusif, de la possibilité pour les enfants de poser leurs lèvres au bord d’une coupe d’argent emplie de vin. Et, peut-être, s’enivrer pour une nuit.

J’ai pu ici, conter, dans deux billets, la soirée. Je colle, en PS, les liens pour ceux qui voudraient se moquer de moi.

Très récemment, j’ai évoqué, non sans émotion réelle, avec un juif très religieux, ces deux soirées, le plaisir de leur déroulement, le mystère des mots de la Haggadah (le récit), les enfants pieds-nus sur la table, pour, presque en courant, faire tourner le panier d’osier, gavé des aliments sacrés, au-dessus de la tête des convives, pour, dans le cri unanime, chanter la bénédiction, les mères fières de leur existence, les pères certains de la destinée, les enfants ébahis par la faculté de l’écart dans la quotidienneté.

Soirée d’exception, la question, en liminaire, étant posée par un enfant (« Mah Nichtana ? ») « Pourquoi ce soir se différencie-t-il de tous les autres soirs » ?

Je lui racontais, à mon interlocuteur, la « porte ouverte » racontée par mon père, par mon oncle. L’étranger, affamé, pouvait, ce soir de « seder », nous rejoindre, sans frapper, juste entrer et s’attabler, se régaler des épinards qui se fondaient, frémissants, dans la chair de l’agneau pascal, divinement cuite.

Je disais que les bédouins qui descendaient de la colline, qui passaient pouvaient donc entrer. Le monde se rassemblait, au-delà des croyances et des statuts, la porte était ouverte.

Mais, curieusement, le front du religieux s’est plissé, un peu baissé.

Je lui ai donc demandé ce qui le contrariait dans mon propos d’apologie de la fête hébraïque, ma préférée.

Il m’a répondu que je me trompais. Non, non, aucun non-juif (un « goy », mot que je n’ai jamais prononcé pour ne pas l’avoir connu avant ma venue en France) ne pouvait venir à la table du « Seder ». Il n’a pas su, au demeurant, m’expliquer le motif de cette expulsion. C’était comme ça.

J’ai cru à une plaisanterie. Et comme on ne discute jamais avec un religieux, lequel substitue toujours un texte toraïque  à la réflexion, une injonction à la pensée libre, je suis passé à autre chose, un sujet anodin pour ne pas froisser et rompre des lances qui peuvent fatiguer. Me jurant, évidemment, que j’allais vérifier.

Je suis donc allé en ligne. Et la sidération a été de mise. Mon religieux ne se trompait pas, même si la discussion était présente, même si, sous certaines conditions, la chose était possible.

Je donne ci-dessous un extrait d’une page de « Torah-Box, un site dont nul ne peut annuler son sérieux.

«  La question de Eva R.

Bonjour,

J’ai appris dernièrement par une amie qu’il était interdit d’avoir un Goy lors des Séder de Pessa’h.

J’aimerais savoir comment faire lorsque le père de son mari est Goy ? Cela pose-t-il un réel problème ? Est-ce une faute de le recevoir, ou est-ce plus une faute de l’offenser et de ne pas l’inviter ?

REPONSE DU « RAV » (UN RABBIN)

Bonjour,

1. Durant Chabbath, il n’est pas interdit d’avoir à sa table une personne non encore convertie. Voir Choul’han ‘Aroukh, chapitre 325, Halakha 1.

2. Durant Yom Tov, cela est interditVoir Choul’han ‘Aroukh, chapitre 512, Halakha 1.

3. Si l’un des soirs de Yom Tov coïncide avec un Chabbath, il n’est pas interdit de l’inviter. Voir Chévet Halévi, volume 9, question 127, Rabbi Eliezer Eksteïn dans Michnat Eliézer, chapitre 142, ‘Hachouké ‘Hémed sur Méguila 15b, Yom Tov Kéhilkhato, page 57, et Hayachar Véhatov, volume 9, page 326 [dans cette référence, il s’agit de Yom Tov qui tombe la veille de Chabbath].

4. Si on doit l’inviter à tout prix [car votre mari risque de se vexer et l’ambiance de la fête risquerait de se dégrader] pour l’un des repas de Yom Tov ne coïncidant pas avec Chabbath [si Yom Tov coïncide avec Chabbath, il est permis de l’inviter], cela est permis.

Dans une telle éventualité, il faudrait que l’invité fasse l’acquisition des plats qui lui sont destinés avant l’entrée de la fête et que durant la fête vous ne fassiez aucun travail pour lui. Il mangera uniquement ce que vous avez préparé depuis la veille de la fête. Voir “Glatt”, volume 24, page 109, passage 54, Rav Gabriel Krauss dans Kol Hatorah, volume 62, pages 48-50 et Rav Chlomo Zalman Grossman dans Hilkhot Hamo’adim-Yom Tov, pages 104-105 et note 115.

Il n’est pas nécessaire que le converti soit chez vous à la maison afin de faire l’acquisition. Pour cela, il faut contacter un Rav compétent dans votre entourage afin qu’il vous indique la procédure à suivre [elle est indiquée dans Kol Hatorah, volume 62, pages 48-50].

5. Il ne faut pas donner les restes de Matsa des soirs du Séder à un non-juif. D’après certains, cette restriction s’applique également à toutes les Matsot que l’on possède. Voir Pisské Techouvot, chapitre 477, passage 3. En cas de besoin, il est absolument possible d’adopter une attitude permissive. D’après certains, cette restriction s’applique uniquement à la Matsa du Motsi, à celle du Korekh et à celle de l’Afikoman. Voir Ben Israël Lénokhri – Ora’h ‘Haïm, chapitre 24, Halakha 16, [page 386].

Mékorot / Sources : Choul’han AroukhHilkhot Hamo’adimKol HatorahGlattHayachar VéhatovYom Tov Kéhilkhato‘Hachouké ‘HémedMichnat EliézerChévet HaléviPisské Techouvot.

FIN.

Ici, j‘ai plusieurs solutions :

– Soit je commente violemment et me convertis au catholicisme

Soit je me dis bien triste pour le judaïsme.

Soit j’appelle tous les membres de ma famille pour leur demander d’inviter un « goy », ce qui serait une avancée dans la lutte contre les sectes.

Soit je  je me tais et écris l’ineptie, en chercant d’autres mots tant il est faible.

J’ai décidé de ne pas commenter, d’être triste pour le judaïsme, de ne pas me fâcher définitivement avec ma famille, d’écrire la fadaise, persuadé que Dieu, intelligence suprême s’il en est, me pardonnera.

PS. ci-dessous, un lien pour, si l’on veut, lire les deux billets que j’ai écrit, il y a assez longtemps, sur Pessah, ma fête préférée.

https://michelbeja.com/extra

https://michelbeja.com/seder-ii-la-cigarette-et-le-vin

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