Suite…”Adolescence ” sur Netflix : la série dont on ne se remet pas

Pourquoi tue-t-on à 13 ans ? C’est la question centrale de cette fiction britannique en quatre épisodes, magistralement filmés et interprétés. Une claque.

Par Violaine de Montclos

Le Point Publié le 18/03/2025 à 14:30

Les caméras de vidéo de surveillance ont tout enregistré : la déambulation du criminel, minute par minute, dans les rues de la petite ville, et le crime lui-même, sept coups de couteau donnés à la jeune Kate, 13 ans, tuée en plein jour sur un parking. Les preuves visuelles, irréfutables et exposées dès le premier épisode, ne laissent donc aucun doute sur l’identité du coupable. Zéro suspense.

Dès lors, d’où viennent cette tension qui ne faiblit jamais, cette angoisse qui contraint à visionner quasiment d’une traite les quatre épisodes de cette minisérie, comme si une réponse, une clé, allait nous être donnée ? Tournée en quatre plans-séquences époustouflants, Adolescence impose au spectateur une immersion irrespirable au sein d’une famille, d’une école, d’un commissariat dont les repères se fissurent, une société ordinaire dans laquelle les adultes, égarés, sont happés par un questionnement auquel rien ne les préparait : pourquoi tue-t-on à 13 ans ?

De l’écran au crime

Que n’a-t-on pas vu, pas compris du monde adolescent, du Far West des réseaux sociaux, de la violence du harcèlement qui sévit dans les cours d’école ? Qui sont en vrai ces jeunes garçons, ces toutes jeunes filles qui ont encore des corps et des visages d’enfant mais vivent, matrixés, désinhibés et hypersexualisés par Instagram, Snapchat et TikTok, comme des hordes sauvages ?

Dès les premières secondes, le décalage entre la gravité des faits et la jeunesse de celui qui les a commis s’impose comme une claque. À l’aube, une escouade de policiers surarmés déferle sur le petit pavillon de la famille Miller, défonce la porte au bélier, se répand en criant dans l’escalier, la salle de bains et les chambres comme s’ils venaient appréhender un dangereux terroriste. Mais celui qu’ils viennent chercher a 13 ans, il s’appelle Jamie, c’est un môme à peine pubère dont la chambre est encore tapissée d’étoiles et qui, d’effroi, urine dans son lit comme un tout petit garçon.

Le spectateur a presque envie de soupçonner le père, il associe inconsciemment ce corps baraqué de plombier quinquagénaire et ce pavillon de banlieue à des images subliminales de violences familiales, d’alcoolisme, pourquoi pas d’inceste. Il se trompe, et il le sait. Mais, durant les quatre épisodes, comme tous les adultes de cette histoire, flics, psy, voisins, parents, il bute sur le mystère et la douceur du petit visage de Jamie, attend une explication, un retournement possible, tout mais pas lui, tout mais pas ce monde d’irréalité numérique et d’enfants criminels

Adolescence, magistralement filmée et interprétée, nouvelle petite bombe de la fiction britannique dont on aimerait tant qu’elle inspire un peu nos paresseux créateurs de séries françaises, ne donne pas de réponse. Mais elle fait subtilement écho, malgré un épisode final un peu trop démonstratif, à nombre de drames récents, et réels, impliquant des mineurs. Et distille surtout une tristesse dont on ne se remet pas. Qu’ont fait ou oublié de faire les adultes pour abandonner leurs enfants dans ce monde numérique dont ils n’ont plus les clés ?

Adolescence, série créée par Jack Thorne et Stephen Graham, réalisée par Philip Barantini, avec Stephen Graham, Owen Cooper, Erin Doherty, Jo Hartley, Ashley Walters (RU, 2025, 4 × 52 à 65 min), sur Netflix

PS. 4 EPISODES, 4 PLAN-SEQUENCES. ON RAPPELLE PAR WIKI CE QU’EST UN PLAN-SÉQUENCE

https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Plan-s%C3%A9quencePlan-sequec

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